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Le Journal de Bord
Lundi 10 avril 2017
En cette première journée, nous sommes allés au sommet du volcan Vulcano qui culmine à 389 m d’altitude. Nous avons fait le tour de La Fossa, qui est actuellement le cratère principal, via l’accès nord. La montée a nécessité environ 2h, par la traversée d’une zone tapissée de cendres noires, et des coulées pyroclastiques recouvertes de cendres plus rouges (oxydées).
Plus on approche du cratère, plus les projectiles deviennent gros. Lorsque les projectiles sont des blocs on les appelle des « bombes ». Leur forme est assez angulaire.
Puis, nous sommes arrivés au sommet du cratère d’où sortaient des fumerolles, issues des chambres magmatiques. En se rapprochant, les fissures sont bordées de cristaux de soufre. Des gaz émanent de ces fissures que l’on appel des fumeroles. Il sort essentiellement de l’eau et du H2S, qui au contact de l’O2 précipite des cristaux de soufre (voir photos ci-dessous) suivant la réaction :
H2S + 1/2 02 ----> H2O + S
- Cristaux de soufre à Vulcano
Nous avons relevé la température avec un thermomètre infrarouge (modèle Voltcraft IR 1200-50D ; précision +/- 1,5°C ; reproductibilité +/- 1,5°C) (voir photo ci-dessous) qui a donné en sortie une valeur de 106 +/- 11°C suivant le protocole opératoire décrit ci-dessous :
Mesures faites sur plusieurs sorties de fumeroles du versant Nord et Nord-Est à environ 286 mètres d’altitude (zone la plus active) ; n mesures = 18 ; valeur moyenne =106°C ; écart type = 21,7 ; t Student (proba 0,05 ; DL 17) = 2,1 ; distance moyenne entre le thermomètre et la sortie des gaz d’environ 20-30 cm ; nombre de préleveurs 4 (valeur rejetée = 0 ; une valeur extrême de 154°C).
Une mesure du pH des rejets gazeux en sortie a logiquement donné un pH fortement acide, inférieur à 1 (test bandelette Merck gamme 0-14). Ceci est du à la présence d’acide dans les rejets gazeux (H2S et H2SO4 notamment).
Tout autour du cratère, nous avons rencontré des grosses bombes qui sont composées de magma refroidi et révèlent le mode explosif des éruptions du Vulcano alors que tout l’environnement est de cendres et de sable.
De l’autre côté du cratère (versant ouest), nous avons remarqué des couches de cendres superposées montrant les différentes éruptions qui se sont succédées.
Du côté des anciennes coulées du Vulcano, la végétation est déjà présente, tandis que sur les flancs de coulées plus récentes, rien ne pousse.
Mardi 11 avril 2017
Nous avons repéré une coulée d’obsidienne sur le versant nord-ouest du Vulcano. En allant faire des prélèvements, on a constaté qu’elle était constituée d’obsidienne sale (photos ci-dessous) :
obsidienne « sale »
Une obsidienne est une roche noire avec une texture vitreuse polymérisée (photo 1 ci-dessous), formée à partir d’un magma riche en silice et en eau, ce qui empêche la formation de minéraux. Ici, elle contient beaucoup d’impuretés, ce pourquoi on la qualifie de « sale » (photo ci-dessus). A certains endroits, on peut observer une texture très vésiculaire due à la formation de bulles de gaz - principalement de l’eau - lors du refroidissement (photo 2 ci-dessous ; photo 3, grossissement). On peut donc deviner la nature visqueuse du magma dont elle est issue, et confirmer ainsi la nature explosive du Vulcano.
photo1, éclat d’obsidienne
photo2, obsidienne très « gazée »
photo3, détail d’une obsidienne « gazée », grossissement x 20
La formation des roches est très évoluée.
On note également la présence de bains de boue sur l’île de Vulcano, détectées dès l’arrivée au port de Vulcano. La boue sulfureuse émane naturellement du volcan et
atteint des températures de 30 à 60 degrés à l’air libre. Les boues, très odorantes, sont néanmoins réputées pour leurs vertus thérapeutiques.
Mercredi 12 avril 2017
Nous nous sommes rendus sur l’île de Stromboli en ferry. C’est un strato-volcan, c’est à-dire qu’il est constitué de couches successives de cendres (comme le Vulcano) et de coulées de lave. Il forme un cône parfait.
Il est actuellement en éruption et ceci de manière continu depuis plus de 2500 ans. Nous avons entamé la montée depuis le versant Nord Est vers 17h afin d’assister au coucher du soleil depuis les hauteurs et aux éruptions spectaculaires de nuit. Le chemin se fait successivement sur des cendres et des coulées de laves. De ce fait, le Stromboli donne son nom à ce type d’éruption, dite Strombolienne, à d’autres volcans du monde.
Parmi les prélèvements, nous avons échantillonné des basaltes avec différents types d’oxydation et avec des inclusions de plagioclase blanc transparent et des cristaux de pyroxènes (en bâtonnets noirs) (photos ci-dessous) :
Lave basaltique contenant du plagioclase (grains blancs)
Basalte contenant du pyroxène (bâtonnets noirs)
Cristaux de pyroxènes isolés
L’ascension s’est faite en partie dans le brouillard, puis le ciel s’est dégagé presque arrivés au sommet, nous laissant apercevoir une des sorties du cratère. Celui-ci nous a accueilli avec une légère détonation et un panache de fumée gris-blanc.
Avec un décor de coucher de soleil en arrière-plan, nous avons poursuivi l’ascension jusqu’à 918m, hauteur maximale possible autorisée.
De là, la nuit tombée aux alentours de 19h30/20h, nous avons assisté à un spectacle d’éruptions multiples de toute beauté. Les gerbes de lave sortaient par 3 bouches du cratère.
Les éruptions avaient lieu avec des intermittences d’environ trois minutes. Au côté opposé, nous avons pu assister au lever de lune pleine et orange.
20h13
20h26
20h29
20h31
20h42...
La descente s’est faite sur un versant composé principalement d’un chemin de cendres.
Vendredi 14 avril 2017
Nous sommes allés sur l’Etna par le versant Sud. Culminant à 3330 m, c’est le volcan le plus haut d’Europe, avec une activité parmi les plus importantes, ainsi qu’un système éruptif très complexe de par l’étendue du domaine volcanique et le nombre de cratères (250 cratères adventifs et plusieurs cratères sommitaux).
Cratères sommitaux
Cratères formés lors d’éruptions latérales
Le sommet du volcan est composé de nombreux cratères, dont une zone centrale regroupant l’essentiel de l’activité éruptive.
Un téléphérique nous a amené à 2500m d’altitude. Lors de l’ascension finale, à pied, nous avons pu prélever différents échantillons, dont du basalte avec une texture vitreuse, nous renseignant sur son refroidissement très rapide ; ainsi que du basalte avec la présence de cristaux d’olivine et de plagioclase aciculaire. L’analyse du pourcentage du rapport Magnésium/Magnésium + Fer dans l’olivine nous donnerait plus d’informations sur la source du magma.
Lave basaltique avec plagioclase (blanc)
Puis nous avons marché jusqu’à la coulée de mars dernier, soit jusqu’à 2800m d’altitude. Le paysage était fait de strates de neige et de cendres. On a pu constater que la coulée dégageait encore de la chaleur, et était constituée de basaltes très friables (appelé « scories »). Quelques relevés de température aux creux des petites cavités formées par la lave ont donné des valeurs proches de 100°C.
Ce basalte provient d’un magma fluide, et montre alors que l’Etna est un volcan peu explosif.
Samedi 15 avril 2017
Après un bon petit déjeuner nous sommes parti visiter la ville de Catane, son marché au poisson au odeur forte. Le temps d’écrire ce journal de bord et la semaine était déjà fini.
Merci aux participantes pour la rédaction de ce journal, leur bonne humeur et leur curiosité pour les volcans siciliens. Rendez-vous pour une prochaine aventure.